Origines des points d’acupuncture traditionnelle

Origines des points d’acupuncture traditionnelle

Jean Motte est acupuncteur traditionnel chinois, directeur-enseignant de l’école d’acupuncture Centre Imhotep. Cet article reprend l’une de ses réflexions sur les points d’acupuncture traditionnelle développée sur son site web le 22 octobre 2020.

Jean Motte

Constitution des 365 points par l’observation patiente

La vérité se perd dans l’obscurité du passé. Comment les points d’acupuncture ont-ils été répertoriés, trouvés, agencés ? Cette question est et reste toujours sans réponse. Tout ce que l’on peut faire, c’est de tenter une explication au travers des textes, contes et transmissions orales qui, mis bout à bout, forment un fil conducteur dont on peut penser qu’une grande partie est vraie.

La première fois que je posais cette question à mon professeur Charles Laville-Méry, je fus accueilli assez vertement. Il y a des questions qui doivent se taire et rester sans réponses, pourtant cela ne me convenait pas.

Dans mon enfance, je fus bercé par l’histoire suivante : L’empereur Yao devait partir combattre à cheval les lignes ennemies. Ce jour-là, il avait une céphalée carabinée. Son médecin personnel n’arrivait pas à la lui ôter quand bien même il utilisait tout l’arsenal des plantes à sa disposition. De dépit l’empereur enfourcha son cheval et partit rejoindre ses troupes. Lors du combat il reçut une flèche sous la malléole externe et son mal de tête disparut immédiatement. De retour au camp, il en parla à son médecin qui se mettra à piquer au même endroit toutes les personnes ayant ce symptôme. Pour autant que cette histoire soit jolie elle n’en demeure pas moins très simpliste au regard des 365 points.

L’autre histoire me fut contée par un très vieil acupuncteur vietnamien qui m’expliqua que les points furent trouvés en fonction de ce que vivaient les personnes au quotidien. Ils purent ainsi, petit-à-petit, constituer un énorme répertoire de points et donc de fonctions. Prenons l’exemple d’une personne qui travaillait dans une rizière toute la journée, l’eau lui arrivant à mi-cuisse. Des crampes et des douleurs des membres inférieurs étaient courantes chez elle : le 32 VB (Zhongdu GB-32) devenait douloureux si elle souffrait de sciatique et le 33 VB (Xiyangguan GB-33) s’activait si elle souffrait des genoux. Un autre, le 31 VB (Fengshi GB-31), devenait douloureux si elle avait des difficultés à arracher les herbes avec ses mains. Le soir, dans les foyers, lorsque la nuit tombait dès 16h00 l’hiver, les paysans avaient froids et cherchaient à se chauffer les pieds. Le 62 V (Shenmai BL-62) nommé « heure de Chen », donc heure de 16h00 en français, signifiait que les bougies s’allumaient afin de chauffer le méridien qui se nommait « grand froid ». C’est ainsi que par l’observation patiente, le glossaire de points augmentait.

Imaginons une autre personne qui avait mal au ventre et se massait instinctivement un point. Il fut décidé qu’il se nommerait 12 RM, milieu de l’estomac (Zhongwan CV-12). Mais cette observation patiente conduisait à découvrir des choses encore plus extraordinaires. Par exemple, cet homme assez âgé se plaignant d’avoir des douleurs au cœur qui lui transperçaient jusqu’au dos et qui instinctivement s’appuyait sur le 12 RM. Ainsi, le glossaire de points s’étoffait aussi de multiples symptômes, tous liés à l’observation.

Il ne faut pas croire que ce processus de découverte des points s’est réalisé en une centaine d’année. Des milliers d’années de transmission se sont écoulées, de chaman à homme médecine, d’homme médecine à acupuncteur, ces secrets de points magiques permettant de guérir, le chasseur, le planteur puis le clan tout entier. La nomenclature s’étoffait au fil des siècles. Certains points se déterminaient par le lieu où se situait la douleur comme l’épaule Nao, le coude Zhou, le poignet Wanggou, le pubis Tsiou kou, la pupille Tong Tse. D’autres points se nommaient par rapport aux fonctions Yin ou Yang, ou bien liquides ou salives, ou encore tendons ou chair. A force, les 365 points furent acceptés comme étant le fondement sur quoi l’acupuncteur travaillerait.

Découvrez le service spécialisé en Médecine Traditionnelle Chinoise

Profitez gratuitement de l'ensemble de la plateforme

logo kiway

Le système des méridiens, des éléments et des organes

365 points c’est beaucoup. Il a donc fallu trouver un système permettant de les regrouper. Le ciel fut certainement le guide de cette entreprise. Lorsque l’on observe les étoiles la nuit, on peut vite se trouver désorienté et perdu. Mais si une personne nous guide dans leur repérage, alors on découvre le monde merveilleux des constellations. Elles se dessinent sous vos yeux parce que les sages de l’antiquité les ont unis par des traits imaginaires. Alors pourquoi ne pas appliquer le même processus ? Ainsi bientôt naquirent de longues chaines de points qui parcouraient le corps comme les fleuves et les rivières qui situent sur la terre.

Culturellement, le mode de fonctionnement des orientaux diffère en tout point de celui des occidentaux. Les Chinois ne cherchent pas à connaitre l’infiniment petit en ouvrant un corps, puis un tissu, puis une cellule, puis un atome. Ils cherchent à unir ce qui est devant leur yeux avec ce qu’il y a de plus vaste : l’homme avec sa maison, son village, son environnement, sa terre, son pays et l’univers. C’est un procédé analogique consistant à observer et reproduire en logique fractale. Ils observèrent un ciel avec 12 constellations, comme les 12 fleuves, duquel découla les 12 méridiens. Ils observèrent 5 planètes, comme les 5 éléments, et deux luminaires le soleil et la lune (s’unissant parfois dans de magnifiques éclipses éphémères) correspondant à deux énergies essentielles circulant dans le corps.

Le grand défi de la pensée chinoise réside dans la manière d’unir des méridiens aux 10 organes intérieurs (Poumon, Gros intestin, Estomac, Rate, Cœur, Intestin Grêle, Vessie, Rein, Vésicule Biliaire, Foie). Pour le méridien du cœur, il est facile de le lier à l’organe Cœur car lorsque celui-ci dysfonctionne il crée toujours cette douleur classique dans le bras. En stimulant, par exemple, un point du méridien de l’estomac, les patients décrivent souvent un trajet particulier exactement en corrélation avec le méridien supposé. Pour les rattacher aux organes il suffit de savoir quel est celui touché en fonction de la pathologie. Très vite, les premiers praticiens comprirent que ces dix organes devaient s’augmenter de deux fonctions le MC (méridien du maître cœur) et TR (méridien du triple réchauffeur) qui feraient 12 méridiens à l’image des 12 constellations.

Cette pensée naturaliste chinoise et surtout vitaliste va enraciner définitivement l’acupuncture dans l’art de préserver sa vie en obéissant aux lois qui gouvernent le ciel et la terre. Tous les 11 ans, le soleil s’agite et des taches noires apparaissent sur son beau cercle jaune. Là encore les Chinois décriront ces taches solaires et comprendront le cycle de 11 ans, l’un des plus secrets, décrit dans la pensée chinoise de M. Granet. Il s’agit du cycle Yang (soleil) attaché au cycle Yin (le ciel profond). De ces deux protagonistes naitront les carrés magiques (Ming T’ang) avec un centre de nombre 5 (le ciel profond) avec celui de centre 6 (le soleil). C’est par l’union de ces deux Ming T’ang de 5 et de 6 que le cycle de 11 sera enseigné plus que discrètement.

Info formation Yi King Thérapeutique

Bénéficiez d’une réduction de 25 euros lors de la prochaine formation sur le Yi King Thérapeutique de Jean Motte en renseignant le code Kiway.

Yi King Thérapeutique

Julien Granata

Dr Julien Granata est Enseignant-chercheur - Membre du laboratoire Montpellier Recherche en Management - Coach Professionnel Certifié - Instructeur de méditation

Laisser un commentaire